Journée des Adjoints et Animateurs en Pastorale Scolaire de décembre 2022
Après avoir vécu un séminaire autour de la question du Pacte éducatif Global au mois d’octobre, les Adjoints et les Animateurs en Pastorale scolaire de nos établissements ont vécu une journée sur la question du fait religieux à l’école, en rapport avec la nature de la Révélation chrétienne. A cette occasion, nous avons eu comme invité le père Christian Salenson, directeur émérite de l’ISTR de Marseille et actuel directeur du Pôle Education et Religion à l’Institut catholique de la Méditerranée de Marseille (ICM).
Ce temps nous a aidés à réfléchir en tant qu’Adjoints en Pastorale Scolaire dans l’Enseignement catholique sur « comment parler de religion à l’école en vivant notre caractère propre ». Au cours de cette matinée de travail, notre préoccupation a été de dégager quelques axes de recherche, à explorer par la suite dans nos pratiques. Nous avons mieux compris les enjeux du religieux dans nos sociétés.
Le père Salenson nous a invités à sortir d’une vue simpliste de la « question sur le religieux » réduite soit à être la chronique d’une mort annoncée constamment repoussée, soit à son rejet dans le domaine du privé. L’enseignement du fait religieux est au cœur même de notre vocation d’éducateurs dans l’Enseignement catholique. Il est une force de résistance critique contre une réduction à la tyrannie du marché, à une raison enfermée sur elle-même et à l’individualisme propre à notre société sécularisée.
Contrairement à ce que pensent certains, l’enseignement du « fait religieux » ne fait pas du tout atteinte au principe de laïcité. Une meilleure intelligence de la laïcité aiderait à comprendre quel est l’enjeu principal pour l’Enseignement catholique, de favoriser des espaces où la « question sur Dieu », qui est aussi la « question du sens », peut être posée librement. Dans la « Formation des formateurs à la laïcité » organisée par le Secrétariat général de l’Enseignement Catholique (SGEC) avec les Instituts de Formation de l’Enseignement Catholique (ISFEC), que j’ai eue l’opportunité de suivre la dernière année, j’ai pu réaliser encore davantage la complexité de ce concept de laïcité trop souvent réduit et parfois instrumentalisé pour rejeter les religions dans la sphère privée. Le droit nous apprend que la laïcité est un concept évolutif, qui doit être interrogé. Elle ne saura être comprise comme une valeur autonome, au contraire elle doit être en permanence considérée en lien avec une valeur fondamentale : la liberté de croire (liberté religieuse).
Personnellement, cette matinée de travail m’a confirmée sur l’idée que ce qui caractérise notre « caractère propre » ne peut pas se réduire à un peu de catéchèse, à une heure par semaine de première annonce ou à quelques activités pastorales, même si cela fait partie de notre proposition pastorale. Notre « caractère propre » est lié à la capacité de créer des lieux (temps et espace), où la « question sur Dieu » peut être posée en toute liberté et où elle est favorisée. C’est pour cette raison que notre action pastorale ne saura être une pure répétition des énoncés catéchétiques, ou des consignes toutes faites. A contrario, elle doit chercher à favoriser les questions, car les réponses sans questions sont comme des arbres sans racines et sans vie. Dans de tels arbres, les oiseaux ne peuvent pas rester longtemps, ni trouver refuge. Il n’y a que la confrontation des questions et des réponses qui peut nous rendre la réelle signification et le dynamisme de notre état de quête. Les questions sont souvent plus importantes que les réponses, car elles ouvrent l’espace de la rencontre libre avec Dieu ; et la vérité se manifeste toujours au cours d’un dialogue.
Oublier ce dynamisme de dialogue conduit à la négation même de la transmission d’une vérité quelconque, car la nature même de la vérité chrétienne est dialogale. Ainsi le disait le théologien allemand, Joseph Ratzinger, analysant la cause de l’abandon de la croyance dans le dernier siècle :
« La crise de l’annonce chrétienne qui s’intensifie depuis un siècle, provient en grande partie du fait que les réponses chrétiennes passent à côté des questions des hommes ; elles ont toujours été et elles sont encore des vraies réponses, mais comme elles n’ont pas été développées à partir des questions, elles sont restées sans effet. C’est pour cette raison qu’il est indispensable de se poser les questions avec l’homme qui cherche : c’est une composante essentielle de l’annonce en tant que telle, car ce n’est qu’ainsi que la parole (Wort) peut devenir réponse (Ant-wort). Nous devons d’abord faire nôtre le questionnement sur Dieu de l’homme d’aujourd’hui afin d’y redécouvrir Dieu et de pouvoir le dire. »
oseph Ratzinger, Foi chrétienne, hier et aujourd’hui
C’est ainsi que l’enseignement du fait religieux est au cœur même de notre « caractère propre ». Il creuse cet état de quête, pas comme un malheur mais comme la chance de pouvoir avancer ensemble tous et chacun, croyants ou pas, chrétiens ou d’autres religions. Seulement dans cet espace de liberté, la personne pourra retrouver le sens (une direction, un leitmotiv, un ordre) et découvrira ainsi une promesse de vie concrète ouverte pour elle vers l’avenir.
Mme Isabel Velasco, Adjointe au Directeur diocésain pour la Pastorale